Brumascope

Brumascope

Comme son nom l’indique, le Brumascope est une machine qui génère des images dans un nuage de brume qui s’épaissie ou s’affine en suivant une boucle sonore et visuelle.

Cet écran de brume se regarde de face, comme un théâtre miniature en trois dimensions. La machine produit des visuels abstraits, sorte d’alphabet graphique, qui flottent suspendus dans l’air.

La machine s’inscrit dans une recherche personnelle sur l’image et la lumière.

Par ma propre expérience de l’image, de la photographie aux arts graphiques, en passant par la vidéo ; j’ai toujours rêvé de nouvelles manières de concevoir ce média. Inspiré par les pionniers de l’art vidéo comme Nam June Paik et Bill Viola qui ont su faire sortir l’image de son cadre et par des artistes “ingénieurs” comme Panamarenko et Jean Tinguely qui ont libéré la machine de son carcan fonctionnel ; mon désir s’est rapide- ment mué en une volonté de concevoir une machine infernale qui réunit ces deux thèmes.

La machine est une ode au low-tech. A l’heure où nous cachons et verrouillons tout “hardware” composant dans nos objets technologiques, à l’heure où la course au pixel nous pousse à acheter des écrans à la définition toujours plus précise, le Brumascospe marque une pause contemplative dans cette course.
L’enveloppe du Brumascope : la machine, exhibe son anatomie. Seules les parties électroniques sont cachées (humidité de la brume oblige). Elle déroule ses tubes et ses fils sur sa charpente et le spectateur avisé peut, s’il en prend le temps, comprendre l’intégralité de son fonctionnement.
Le coeur de la machine : l’écran de fumée, se comporte à l’inverse des écrans auxquels nous sommes accoutumés.
Il est volatil, un simple geste et il disparaît. Il est instable, sa densité variant en permanence. L’image qu’il fixe bouge, se floute, s’épaissie ou s’amincie. Il est également en trois dimensions et à celles-ci s’ajoute une quatrième, la texture de la brume qui n’est jamais deux fois la même. Elle donne une peau marbrée aux surfaces de l’image.

Le Brumascope questionne la nature de l’image. Un visuel en deux dimensions se voit transformé en une forme palpable en trois dimensions qui ne se veut pas hologramme mais entité mouvante s’animant au gré des flux de brume. La question est, qu’est-ce qu’une image ? On la croit d’une forme stable, immuable. Mais la voilà qui devient totalement autre chose, elle s’accapare une nouvelle dimension. On la croit fixe, mais la voilà mouvante, changeante, épaisse puis fine. On la croit figée sur un support ou projetée sur une surface, mais nous la retrouvons suspendue dans le vide, accrochée dans quelques micro-gouttelettes d’eau.

Le spectateur est appelé à observer l’image, la toucher, l’apprivoiser même. La seule condition est de rester calme, de ne pas faire de mouvement brusque. Sous peine de la faire s’envoler.

Photos 7 à 9 : Marie Dépeux-Hengoat